Formater un livre numérique

Ce billet fait suite à Reflowable Text et Fixed Layout. Il fait partie d’une série de 4 billets sur la production d’un livre numérique. À venir, « Les erreurs à éviter » & « Manifeste pour un (vrai) design du livre numérique ».

Même si un livre numérique est un livre comme un autre, il n’empêche qu’il est quelque peu différent sur certains points. La « mise en page » est la principale différence entre un livre papier et un livre numérique : on ne peut pas réellement parler de mise en page en ce qui concerne un e-book, puisque c’est le lecteur qui choisit la police de caractère, sa taille, parfois les marges et l’interligne. Le texte n’est pas « imprimé » sur l’écran, c’est une sorte de flux qui peut se régler à volonté. Un e-book n’est donc pas une simple conversion d’un livre de papier ; le traitement du texte étant profondément différent, il faut adapter votre formatage.

Il tient à l’auteur ou l’éditeur de prendre cela en considération et de penser le formatage du texte différemment. Un e-book de qualité ne copie pas la mise en page d’un livre papier dans ses moindres détails, il est pensé pour le confort du lecteur. Dans la majorité des cas, l’auteur/éditeur ne peut donc pas contrôler la mise en page de son livre numérique—je reviendrai sur ce point dans un billet vu qu’il y a beaucoup de choses à dire en ce qui concerne certains revendeurs et leur respect de certaines règles de base des langages informatiques utilisés… mention spéciale à B&N qui ne respecte même pas une règle de base CSS.

Malheureusement, beaucoup de personnes ignorent que des applications dédiées existent (Sigil, eCub, Mobipocket Creator, etc.), elles utilisent donc un traitement de texte, exportent un fichier .doc ou .html et le convertissent en .mobi et/ou .ePub. Or, un traitement de texte permet de faire des choses que ces formats ne gèrent pas (colonnes, tableaux, etc.), il est donc trop facile de se tromper. Ce billet s’adresse aux personnes qui utilisent un traitement de texte pour fabriquer leur livre numérique—même si ça ne fera pas de mal aux autres de reprendre certaines idées.

Les bases

Privilégiez à tout prix l’épure. Il ne sert à rien d’appliquer des couleurs (liseuse = écran à encre électronique 16 niveaux de gris, un rouge sortira donc en gris très clair, quasiment invisible sur l’écran, résultat inverse de l’effet recherché…), lettrines, polices de caractère fantaisistes et ce genre de choses. D’une part, c’est particulièrement moche dans la plupart des cas. D’autre part, elles n’apparaitront pas dans votre e-book (c’est donc une pure perte de temps). Bref, pensez pureté : le texte pour ce qu’il est.

Un e-book se doit également d’être bien organisé. Si ce n’est pas fait, la lecture deviendra pénible. Appliquez des styles (headings, citation, sous-titre, etc.), ils sont là pour vous aider à organiser votre livre. De plus, ils peuvent être modifiés. Ainsi, une seule modification sur un style se répercutera sur l’ensemble des parties qui l’utilisent.

Séparez vos chapitres pour offrir encore un peu plus de lisibilité à votre texte. Chaque chapitre a droit à sa nouvelle page, vos lecteurs vous remercieront.

Oubliez toute notion de pagination et de page, pensez plutôt votre texte comme une page web. Cela implique que vous oubliiez les en-têtes, pieds de page, numéros de page, sauts de paragraphe et sauts de page « à l’arrache » (touche entrée). Un saut de page créé à l’aide de la touche entrée produira seulement un « écran vierge » sur liseuse,  ou pire encore… votre chapitre débutera en plein milieu de l’écran qui suit. Pour être plus clair, ce que vous voyez sur votre écran d’ordinateur n’est pas ce que les lecteurs verront sur leur appareil.

Les trucs à éviter

Oubliez les tabulations. D’une, certains convertisseurs les oublient. De deux, la taille de l’écran de la machine utilisée par chaque lecteur n’est pas la même, deux tabulations sur un écran d’ordinateur passent très bien ; sur un écran de téléphone, c’est un saut de ligne. Indentez plutôt votre texte (réglez le retrait du style paragraphe ou faites glisser l’élément retrait sur la règle).

Oubliez la touche entrée. On ne saute pas des paragraphes avec la touche entrée, que l’on veuille séparer deux paragraphes ou commencer un nouveau chapitre sur une nouvelle page. Tout ceci doit être manuellement réglé (interligne ou espacement). Certains convertisseurs (export EPUB de Mac Pages) inséreront un saut de page s’ils détectent le style « Chapitre ». Pour d’autres, il faudra un saut de page (inséré ou coché dans les styles). Je vous conseille donc de l’insérer systématiquement, au cas où.

Oubliez le texte en colonnes, les tableaux et graphiques, etc. Ils ne seront pas exportés dans les formats de livre numérique (mobi et ePub). Certains convertisseurs vont même considérer que les lignes des deux colonnes sont continues et en faire une seule phrase. Pour les graphiques et tableaux, faites une capture d’écran (sélection, fenêtre, etc.) puis insérez-les comme des images. Attention : les images doivent être ancrées.

Minimisez les variations de tailles de police. Encore une fois, il faut penser que le livre pourrait être lu sur des écrans très petits (téléphone). Pour information, le format A5 est celui qui se rapproche le plus d’un écran 6 » de liseuse.

Minimisez l’usage des symboles, qui pourraient ne pas être affichés correctement sur certains appareils.

Différencier les paragraphes

Il existe deux méthodes pour différencier vos paragraphes et il est communément admis que vous ne pouvez utiliser les deux en même temps.

Pour les œuvres de fiction, vous veillerez à ce que la première ligne de chaque paragraphe débute en retrait (on parle d’indentation).

Pour la non-fiction (principalement guides et documents techniques), on utilise souvent la « méthode en bloc ». Elle consiste à régler l’interligne suivant chaque paragraphe afin de créer un espace vierge qui sépare les paragraphes.

En résumé

Pensez la mise en page de votre livre numérique comme un formatage simplifié : retour à la ligne après chaque paragraphe, première ligne en retrait, caractères italiques et gras (mais pas soulignés), style « Chapitre » et « normal ».

Personnellement, j’ai horreur d’utiliser un traitement de texte pour construire un livre numérique pour la simple et bonne raison que ce n’est pas un outil vraiment adapté, c’est un pis-aller. Il n’a pas été prévu pour ça, on lui a rajouté une fonction/plugin quasiment annexe (export EPUB) et basta. Pas de mode « livre numérique » qui permettrait d’avoir un aperçu du résultat final, des choses possibles à intégrer alors qu’elles ne passeront pas dans le livre numérique, etc. En gros, on te demande de couper des tranches de jambon en petits carrés et on te donne une hache, démerde-toi avec ça. Et autant dire que je suis également l’exact opposé du fan absolu des convertisseurs vu la perte totale de contrôle qu’ils impliquent…

Remarque importante : vous feriez bien de jeter un petit coup d’œil aux guides des services que vous utilisez afin d’éviter de perdre du temps. Vous saurez ainsi comment formater au mieux pour éviter les bugs de conversion. Par exemple, vous pourrez trouver un guide très complet (en français) sur Smashwords. N’hésitez donc pas à vous y référer en cas de doute, surtout qu’il est totalement gratuit.

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À suivre : les erreurs à éviter.